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La plasticienne Katerina Jebb. photo Romain Boutillier – ville d’Arles

2008 et 2013. Ces deux années sont marquées par le passage de Katerina Jebb à Arles où elle a exposé son travail de plasticienne et de photographe au sein des institutions culturelles que sont le musée Réattu et les Rencontres d’Arles. Depuis quelques jours, cette femme à la crinière blond vénitien et aux yeux malicieux, est de retour avec une exposition monographique que lui consacre le musée Réattu, musée des Beaux Arts de la Ville. Elle porte sur son travail d’orfèvre autour de l’image. Sous le titre Deus ex machina l’univers baroque de l’artiste anglaise installée en France se décline en cent clichés et deux vidéos.

Hier vendredi 1er juillet 2016, lors de l’inauguration de l’exposition, le maire d’Arles Hervé Schiavetti, a  rappelé avant tout le rôle déterminant de Jean-Maurice Rouquette, conservateur en chef honoraire des monuments et musées d’Arles, et du photographe Lucien Clergue, premiers à faire rentrer l’art de la photographie dans un musée français. Des oeuvres de Cartier-Bresson, Willy Ronis, Brassaï, de Lucien Clergue et de bien d’autres y sont conservées et accrochées régulièrement. Aujourd’hui, une nouvelle génération de photographes comme Katerina Jebb font vivre au musée un tournant de nature contemporaine déjouant les conventions.

La magie du scanner numérique

C’est l’Arlésien Christian Lacroix qui la fait découvrir ici au public, à l’occasion de sa carte blanche en 2008 au coeur du Grand-prieuré de l’ordre de Malte. L’esthétique singulière de Katerina Jebb apparaît sous la forme de recherches, de hasards et surtout passe par l’utilisation d’un scanner numérique qui remplace l’appareil photo. Obsédée par les vêtements et les traces laissées par ceux qui les ont portés, elle donne, grâce au scanner, une nouvelle dimension à la matière, un rendu plus vrai que nature. « Le scanner numérique, cet outil servant à la reproduction de documents, est ici utilisé à des fins artistiques et a aussi valeur de témoin car sa spécificité technologique permet de saisir des détails ténus, comme cette tache sur le corsage de la reine Marie-Antoinette,  » souligne Pascale Picard, directrice du musée Réattu. Le scanner parviendrait-il à percer des mystères ? En tout cas cette machine chère à Katerina Jebb efface la perspective propre aux objets reproduits, lui confère un côté hyperréaliste déroutant. La plasticienne pratique son exploration sur les visages, les corps. L’approche est chirurgicale. Et son jeu avec la machine se poursuit au profit d’autres obsessions comme les reliques de l’histoire : des lettres manuscrites, la veste de Napoléon, les vestiges d’ateliers d’artistes.

Le sens de la visite

La visite se fait en quatre étapes. Au rez-de-chaussée la chapelle des chevaliers de l’Ordre de Malte accueille les Unitilited  Icons (donation faite par l’artiste au musée Réattu) une série de photos de très grand format représentant des mannequins habillés de robes de Christian Lacroix. C’est comme un défilé fantomatique sous la surveillance de l’actrice Tilda Swinton qui elle est filmée. Une autre vidéo attend les visiteurs au premier étage du musée.

Le deuxième étage donne lieu à une série de portraits réalisés au scanner. Les plus connus, ceux des actrices Christin Scott Thomas, Isabelle Huppert, la chanteuse Kylie Minogue (présente à l’inauguration).

Les deux grandes salles du dernier étage sont consacrées à l’hyperréalisme mêlant provocation et témoignage d’archives. La provocation on la retrouve avec ce mignon petit canard, pourtant dérangeant ou à travers d’autres objets détournés de la société de consommation. Ici la lumière froide du scanner se réchauffe pourtant quand Katerina Jebb s’investit dans ses travaux d’inventaire d’ateliers d’artistes comme Picabia, Balthus. Encore là, rien ne lui échappe. Elle montre tout «  parce que c’est la vie  » dit l’artiste.

L’exposition Deus ex machina est à voir jusqu’au 31 décembre 2016. A l’occasion d’une visite, vous pourrez également admirer des oeuvres appartenant aux collections du musée, allant de Jacques Réattu, en passant par Picasso, Zadkine ou Christian Lacroix. Le musée est fermé le lundi.

Musée Réattu, 10 rue du Grand-Prieuré. Tél. 04 90 49 37 58.