
S’adapter à une situation inédite, c’est le défi auquel nous sommes tous confrontés depuis le début du confinement. Le CCAS a mis en place une cellule d’écoute psychologique pour soutenir ceux qui vivent mal le confinement. Au bout du fil, Elizabeth Robert-Channaoui, psychologue-clinicienne qui intervient toute l’année pour le CCAS dans les lieux d’accueil enfants/parents et auprès des équipes des structures petite enfance. Rencontre.
- Quelles sont les conséquences psychologiques du confinement ?
- Elizabeth Robert-Channaoui : Ce sentiment d’enfermement, cette privation de liberté est difficile à vivre pour tout le monde. Perdre sa routine engendre la perte de repère. Ne plus pouvoir approcher, toucher ses proches peut également avoir des conséquences à long terme. Enfin, pour nous qui nous projetons sans cesse dans l’avenir, nous sommes pour l’instant obligés de rester ancrés dans le présent. Ce virus met notre capacité d’adaptation à l’épreuve.
- Comment se passent les entretiens ?
- Elizabeth Robert-Channaoui : Les personnes se signalent ou sont orientées vers la cellule psychologique par les agents du CCAS. Au cours d’un premier entretien, nous faisons le point sur leur situation, nous engageons la discussion. Je les rappelle une fois par semaine et nos entretiens sont de plus en plus longs.
- Comment parvenez-vous à les aider ?
- Elizabeth Robert-Channaoui : A travers nos discussions, l’évocation de souvenirs, parler du cadre familial des enfants et petits-enfants, des activités pratiquées avant le confinement, j’essaie de réactiver la sensation de plaisir. C’est par ces petits fils tirés que l’on parvient à trouver des portes d’oxygénation essentielles. Mon appel est attendu par ces Arlésiens, parler leur fait du bien. Il nous arrive fréquemment de plaisanter et de rire, c’est aussi nécessaire.
- Quelles sont les personnes qui vous appellent le plus fréquemment ?
- Elizabeth Robert-Channaoui : Les femmes sont plus enclines à se confier. Certaines, souvent isolées, se trouvent démunies face à l’arrêt brutal du quotidien, de la routine. Mais il y a aussi des femmes seules avec enfants qui sont inquiètes quant à leur situation économique.
- Comment la cellule va fonctionner après le déconfinement ?
- Elizabeth Robert-Channaoui : Nous n’avons pas encore discuté de la suite, mais il me semble prématuré d’arrêter le suivi de ces personnes. Cette situation peut être vécue comme un traumatisme pour les personnes les plus fragiles. Tant qu’elles ne sont pas en contact direct et physique avec leurs familles, il faut continuer à maintenir le lien.
- Avez-vous déjà rencontré une telle situation ?
- Elizabeth Robert-Channaoui : La situation était totalement différente, mais, en 2003, j’ai participé à la cellule psychologique montée par le CCAS pour venir en aide aux sinistrés des inondations. Nous les avons suivis jusqu’à ce qu’ils retournent chez eux.
- Que nous conseillez-vous pour traverser cette période le plus sereinement possible ?
- Elizabeth Robert-Channaoui : De se mettre en action, se remobiliser. Ranger, trier, créer. Faire des choses simples, coudre, colorier, faire des puzzles, il faut bien sûr trouver un intérêt et surtout du plaisir. Cuisiner est une bonne méthode, car on est dans le partage. L’acte de créer est certainement le plus important car il apporte une satisfaction comme customiser des boites de chaussures, récupérer d’anciens bijoux pour en imaginer d’autres. Il y a plein de petites choses à faire pour s’occuper et passer sereinement cette période atypique. Mais il ne faut pas culpabiliser de ne rien faire, il faut accepter toutes les émotions.
*Le CCAS a mis en place une permanence téléphonique de 8h30 à 16h30 à destination des personnes en difficulté. Vous pouvez également appeler ce numéro pour signaler une personne qui aurait besoin d’aide. Tel. 04 90 18 46 80 ou 04 90 18 46 87.
L’association Alliance Pays d’Arles, centre d’accompagnement psychologique, organise également des cellules d’écoute du lundi au vendredi de 13h à 17h. Tél. 06 11 43 93 81.