
Ernest Pignon-Ernest n’a jamais vu toréer José Tomas. Il n’est pas aficionado (“Je n’ai pas les codes”, dit-il) et n’a assisté qu’à deux corridas dans sa vie. Pourtant, l’artiste a capté l’essence des gestes, la magie des passes, l’immobilité surnaturelle du plus grand des matadors. Comme les mots du poète André Velter, les croquis d’Ernest Pignon-Ernest sont une interprétation du toreo de José Tomas.
Le livre Sur un nuage de terre ferme, qui vient de sortir chez Actes Sud, réunit les vers de l’un et les traits de l’autre dans une version de papier de la corrida du 22 juin 2019 à Grenade, deuxième corrida prodigieuse de José Tomas. André Velter a joué le rôle du passeur entre Ernest Pignon Ernest et José Tomas (“Farouche énigme”). Poète et aficionado, ses mots ont inspiré l’artiste qui a vu et revu des dizaines d’heures de vidéos de la corrida de Grenade, noircissant des pages de carnets.

“Je connaissais surtout la corrida à travers la vision charnelle, sensuelle de Pablo Picasso”, explique le peintre, “José Tomas m’a emporté dans une autre dimension, dans un univers sacré. Il est habité, comme les poètes et les mystiques. Il y a chez lui une intensité intérieure”. Dans ses croquis, le visage émacié du matador rappelle les portraits de Pier Paolo Pasolini.
Velter et Pignon-Ernest ont publié plusieurs livres à quatre mains comme Ceux de la poésie vécue (Actes-Sud 2017) ou Pour l’amour de l’amour, figures de l’extase (Gallimard 2015). Sur un nuage de terre ferme est leur deuxième livre consacré au matador. Le premier (le Tao du Toreo Actes Sud 2014) célébrait le premier miracle de José Tomas à la date inoubliable du 12 septembre 2012 dans les arènes de Nîmes.
Entre les poètes et les mystiques, Velter et Pignon-Ernest ont offert à José Tomas une place unique et étrange que personne d’autre ne peut occuper.
Encore quelques jours (jusqu’au 11 octobre) pour découvrir une sélection de dessins de Pignon-Ernest à la galerie Actes Sud au sous-sol de la librairie où est en vente « Sur un nuage de terre ferme” (26 euros) ainsi que “Tao du Toreo”, également publié chez Actes Sud.